Texte : Sebastien MorandPhotos : Claude-Alain Ferrière

Au fait du projet depuis un certain temps, Timeless Addict a finalement été convié pour découvrir, en vrai, la Bizzarrini 5300 GT Corsa Revival au sein du bel écrin de Pegasus Automotive. Situé à Nyon, le garage est notamment connu pour représenter les agences Aston Martin, Rolls-Royce et McLaren en Suisse Romande.

Petite parenthèse avant de rentrer dans le vif du sujet, ce garage appartient au groupe Pegasus, également propriétaire de la marque Bizzarrini depuis 2020, je vous en parlais lors de notre essai de la baby Bizzarrini, la 1900 GT Europa.

Pour revenir à la belle italienne qui nous intéresse aujourd’hui, elle est la réédition de la mythique Bizzarrini 5300 GT conçue en 1963.

Grande tendance du moment, proposer de « nouvelles » autos reprenant le style d’un modèle iconique appartenant au passé en lui faisant bénéficier du savoir-faire d’aujourd’hui ainsi que de la technologie moderne dans certains cas.

Il y en a pour tous les goûts et si c’est parfois des « Continuation » comme les anglais aiment bien les appeler, qui sont soit des copies conformes à l’original, soit une robe connue sur une voiture plus moderne et plus performante, leur point commun est souvent le budget conséquent nécessaire pour les acquérir. Mais bon, quand on aime, on ne compte pas, donc oublions ici ce détail.

Je ne vais pas vous refaire l’histoire de Bizzarrini, tous les détails se trouvent dans notre article concernant la 1900 GT Europa.

Mais brièvement, Giotto Bizzarrini, après des études d’ingénieurs, a fait ses armes chez Alfa Romeo, Ferrari et Lamborghini où il a notamment contribué à la réalisation du châssis de la Giulietta, aux différentes 250, dont la légendaire 250 GTO, puis au premier V12 de la marque au taureau, celui de la 350 GT.

Après cela, il a collaboré avec différents acteurs du monde automobile italien de l’époque, sans grand succès, puis il a développé la 5300 GT, tout d’abord en collaboration avec Iso Rivolta sous le patronyme Grifo A3C. Il a finalement persévéré seul et le modèle emblématique deviendra la Bizzarrini 5300 GT. Détail non négligeable à propos de cette dernière, il s’agit de la première voiture avec une véritable implantation moteur centrale avant, le moteur étant un V8 Chevrolet. Mais nous aurons l’occasion d’y revenir dans un prochain reportage, on ne vous en dit pas plus pour le moment.

Depuis 2020, en se basant sur les archives de la marque, les nouveaux dirigeants de Bizzarrini ont œuvré pour concevoir cette 5300 GT Corsa Revival. Au final, ce sont au total 24 exemplaires qui seront produits d’ici la fin de cette année au sein d’une usine dédiée en Angleterre.

Cette « nouvelle » 5300 GT puise ses gênes sur le châssis original 0222 de 1965 qui remporta sa classe aux 24 Heures du Mans de cette même année en finissant 9ème au classement général. L’histoire raconte qu’après cette course, Giotto était rentré par la route avec la voiture victorieuse jusqu’à Livourne, de quoi démontrer encore un peu plus sa fiabilité.

Pour revenir à celle qui nous intéresse aujourd’hui, si elle a troqué la fibre de verre de sa carrosserie pour de la fibre de carbone et qu’elle a hérité de quelques attributs de sécurité imposés par les normes actuelles de la FIA, elle respecte globalement l’esprit de son aïeul. Sous son capot, on retrouve un V8 5.3 à carburateur Weber 45 DCOE (Doppio Corpo Orizzontale E) qui développe 400 ch. En regard du poids annoncé à 1’230 kg, ça promet des sensations très intéressantes, avec de surcroit une répartition de masses 50:50.

Gage de l’importance apportée aux détails, après un travail minutieux, la nouvelle équipe Bizzarrini a réussi à reproduire à l’identique la teinte de la voiture de l’époque. Nommée « Rosso Corsa Bizzarrini 222 », elle devait initialement décorer les 24 unités ; toutefois, certains clients ont souhaité un coloris différent. On a notamment pu voir quelques photos d’une auto jaune actuellement en fabrication et c’est très beau également. De plus, les ingénieurs sont même parvenus à retrouver certains artisans qui ont travaillé à la conception du modèle original et à collaborer à nouveau avec eux. Petite indication, il y a environ 4’000 heures de travail, quasiment exclusivement à la main, nécessaires pour fabriquer chacune de ces 5300 GT Corsa Revival.

L’objet est tout simplement magnifique, une véritable œuvre d’art représentant l’apogée du sport automobile des années 60, avec une singularité sans égale tant la marque est méconnue. Petit bémol à mes yeux – le mot « Corsa » vous a peut-être mis la puce à l’oreille – cette « nouvelle » 5300 GT n’est pas homologuée pour la route et il faudra vous rendre sur circuit pour en profiter. Il nous a toutefois été précisé qu’elle sera acceptée dans les compétitions historiques organisées par Peter Auto.

Avec plus de la moitié de la production déjà vendue et cela malgré un tarif élevé (environ 2 millions de francs), il semblerait que ce genre de joujou extra dispose d’une clientèle et c’est tant mieux. Reste à voir si les heureux élus iront en découdre sur la piste ou si les autos resteront bien à l’abri dans leurs collections. Je crains malheureusement que ça soit le plus souvent la seconde option.

Dans le cadre de cette présentation, nous avons pu échanger avec les principaux intervenants de la marque, à savoir Julian Jenkins, le Chief Commercial Officer, et Simon Busby, le Chief Marketing Officer, qui nous ont vanté les louanges de cette auto exceptionnelle. Je ne peux donc qu’espérer que l’avenir me donne tort et que la mélodie enivrante de cette belle italienne rugisse à la moindre occasion.

Autre fait important annoncé à l’occasion de cette présentation – et c’est là que se trouve la raison majeure de cette réédition de la 5300 GT – Bizzarrini va présenter d’ici 2025 une première hypercar qui s’appellera « The Giotto » en l’honneur du créateur de la marque décédé au printemps de cette année. Animée par un V12 atmosphérique, elle sera réalisée en collaboration avec le fameux bureau de design Giugiaro. Le fondateur, Giorgetto Giugiaro, avait des liens fort avec Bizzarrini et d’ailleurs, à l’occasion du Turin Motor Show de 1968, Giugiaro avait réalisé le concept car « Manta ». Également présent lors de cette événement chez Pegasus Automotive, Fabrizio Giugiaro, le fils de Giorgetto, a confirmé l’enthousiasme qui accompagne ce magnifique projet dont nous sommes impatients de découvrir le résultat.

Merci à Pegasus Automotive Group SA à Nyon pour l’invitation à cette présentation.