Aston Martin, la marque qui fait rêver, d’autant plus lorsqu’on évoque les premiers coupés, principalement celui rendu ultra célèbre par le fameux agent 007. Oui oui, vous la connaissez tous, je parle bien évidemment de la DB5.
Avant cette dernière, il y a eu la DB4, puis après il y a eu la DB6. C’est de cette belle anglaise en particulier dont nous allons parler aujourd’hui, mais dans sa déclinaison un peu plus sportive, soit la DB6 Vantage.

La DB6 a été présentée au London Motor Show en octobre 1965 et elle vient remplacer la DB5 en apportant, selon les informations du constructeur, une multitude d’améliorations. Pour être précis, il faudrait même l’appeler DB6 Saloon, puisque la gamme dispose également d’une version décapotable nommée DB6 Volante.
Le patron d’Aston Martin à l’époque, David Brown (l’origine des dénominations DB), a fait évoluer les autos de la marque vers le luxe et le confort, au détriment du sport. C’est d’autant plus flagrant avec la DB6 qui dispose d’un empattement allongé (+9.5 cm) par rapport à celle qu’elle remplace pour offrir ainsi plus d’espace à bord. La publicité en 1965 la présentait comme la première voiture de grand tourisme avec quatre places et la plus rapide de ce segment. Je n’ai pas pu comparer avec une DB4 ou une DB5, mais clairement cette DB6 dispose d’un habitacle très cossu et très confortable.
La DB6 sera produite à un peu moins de 2’000 exemplaires jusqu’en 1970, alors même que sa remplaçante, la DBS, est déjà au catalogue depuis presque trois ans. Cette dernière devait débuter sa carrière directement avec un V8, signifiant la fin du 6 cylindres en ligne, mais à la suite de retard, les premiers modèles ont hérité de la mécanique de la DB6. Il faudra attendre 1994 pour retrouver le patronyme DB avec l’arrivée de la DB7, mais on est loin du sex-appeal ravageur et du charisme des DB4, DB5 et DB6.
Pour revenir à la DB6, en matière de ligne, on peut lui reprocher d’être un peu trop longue (4m62) en comparaison des modèles précédents. De plus, avec son pare-brise plus droit, ainsi qu’une hauteur légèrement accrue (1m36), les proportions sont un peu moins séduisantes que sur les DB4 et DB5.

Toutefois, le dessin général reste terriblement désirable, surtout habillé de la teinte « Almond Green » de votre voiture d’essai. A noter que ce n’est pas la couleur d’origine de cette auto qui a été produite en « Caribbean Pearl Blue », mais cela lui sied tellement mieux. Bon d’accord, grand fan du vert, surtout sur les autos anglaises, je ne suis pas totalement objectif. Reste que ce magnifique « Almond Green » donne à notre DB6 Vantage encore plus d’élégance.
A l’avant, peu de chose permettent de faire la différence avec une DB5. Il y a surtout le pare-chocs qui est maintenant séparé en deux parties, laissant la place au milieu de la face avant pour la plaque d’immatriculation. Le changement le plus flagrant se situe à l’arrière, nettement plus droit, en fait de type « Kamm ». Ça découle des études d’un ingénieur aérodynamique allemand, Wunibald Kamm, réalisées dans les années 30. Cette carrosserie « queue tronquée », aussi connue sous le nom « Coda tronca » pour quelques belles italiennes comme la Fiat 850 Coupé et l’Alfa Romeo Giulia TZ, permet notamment de réduire la résistance à l’air. Sur notre DB6, l’arrière est encore affublé d’un léger spoiler intégré à la carrosserie qui améliore également la stabilité à haute vitesse.
D’autres petits détails esthétiques permettent d’identifier une DB6, exception faite des badges bien évidemment, mais il faut un œil avisé pour les remarquer. En fait, de manière générale, seuls les connaisseurs sont capables de différencier les trois modèles à savoir DB4, DB5 et DB6. Croyez-moi, j’ai pu le constater lors de cet essai, pour la plupart des gens, cette auto, même si elle n’est pas grise, c’est tout simplement la voiture de James Bond. Ceci lui confère d’ailleurs un capital sympathie énorme et je pense même qu’à ce jour, c’est l’auto qui m’a valu le plus de pouces levés et de têtes qui se tournent pendant un essai Timeless Addict.

Comme je le disais précédemment, en m’installant à bord de cette DB6, je ne peux que constater la magnifique présentation de cet intérieur. La qualité de fabrication et des matériaux est tout simplement exceptionnelle. Cuir et aluminium sont de mise, le ressenti est vraiment excellent.
Une anecdote raconte qu’en 1968, un vieil ami de David Brown l’aurait sollicité afin qu’il lui vende une DB6 à prix coûtant. Sir Brown lui aurait répondu qu’il en serait ravi et quelques jours plus tard, l’ami en question aurait reçu une facture de £ 1’000.- plus élevée que le prix catalogue (£ 4’998.-). Une chose est sûre, à cette époque, l’artisanat était plus important que le profit.
L’élément qui me charme le plus, c’est l’agencement du splendide tableau de bord composé de multiples compteurs Smiths, ainsi que le très beau volant trois branches en bois. Avant même d’avoir démarré le moteur, le voyage a déjà commencé, c’est magique.
Preuve du niveau d’excellence de cette DB6 pour son époque, elle dispose d’une climatisation, de vitres électriques, de ceintures de sécurité avec enrouleur, d’un autoradio et même d’une direction assistée. Quasiment tout ceci était proposé en option, notre voiture d’essai coche toutes les cases, c’est impressionnant. Je constate également la qualité de l’insonorisation une fois les portes fermées, même la musique du 6 cylindres se veut feutrée, c’est bluffant pour une auto de presque 60 ans.
S’il fallait lui trouver un léger défaut, je dirai que les assises ultra confortables manquent de maintien latéral. Certes, la vocation de l’auto n’est pas résolument sportive, mais ça marche quand même suffisamment bien pour constater qu’on n’est pas assez tenu, et même pas tenu du tout si on est assis en passager.
Grâce à ses dimensions plus généreuses, l’habitabilité est donc nettement plus intéressante que dans les DB4 ou DB5 et cela permet aussi de proposer un coffre digne d’une véritable GT.

Pièce maitresse de cette DB6, le magnifique 6 cylindres en ligne de 3’995 cm3 qui développe 285 ch d’origine. C’est la même mécanique que la DB5, mais du fait qu’elle se veut légèrement embourgeoisée et un tout petit peu plus lourde (1’468 kg), une DB6 de base sera un peu moins performante. Toutefois, avec la spécification Vantage qui équipe notre auto de test, les trois carburateurs d’origine sont remplacés par des Weber et ainsi sa puissance atteint 325 ch. Dans cette configuration, la DB6 Vantage promet des performances plus intéressantes que ses devancières, seule la DB4 GT est en mesure de rivaliser !
Cette mécanique est couplée à une boîte de vitesses ZF à 5 rapports qui se manie aisément, avec douceur et précision. Là encore, c’est plutôt saisissant pour l’époque.
Mais le plus beau dans tout cela, c’est la sonorité de ce moteur. Il chante à merveille et diffuse une musique qui me charme totalement. A mon avis, c’est le plus beau bruit pour un 6 cylindres et je recommande fortement de rouler fenêtres ouvertes afin d’en profiter pleinement.

Bercé par la symphonie du 6 cylindres, j’attaque les premiers kilomètres à bord de cette anglaise en quittant Genève par l’autoroute. Rapidement je constate que toutes les commandes, surtout l’embrayage, se manient avec une grande aisance. Lancé à 120 km/h, je ferme les fenêtres et j’enclenche la climatisation, l’ambiance est feutrée et dans cette quiétude je n’aurais aucun mal à rejoindre la Côte d’Azur. Je le pressentais, mais ces premières impressions à son volant confirment que cette DB6 Vantage est une véritable GT aux qualités de grande routière sans faille pour son âge. De plus, grâce à sa puissance, les relances sont bonnes et je peux facilement faire ma place dans le trafic habituel entre le bout du lac Léman et la Côte Vaudoise.
Pour continuer ma balade, je m’engage sur les routes de campagne que je connais parfaitement, sans oublier bien évidemment d’ouvrir les fenêtres pour écouter le chant du 6 cylindres. Je découvre une auto toujours aussi plaisante à rouler. Certes il faut abandonner l’idée d’appliquer un rythme soutenu lorsque ça devient sinueux, ce n’est clairement pas son créneau. En revanche, à l’instar de la Ferrari 365 GTB/4 « Daytona », si le tracé se compose de virages longs et rapides ainsi que de belles lignes droites, pas d’inquiétude à avoir, l’asphalte défile à très bonne allure. Je me sentais quand même plus à l’aise avec l’italienne, mais ça doit venir de la suspension de l’anglaise que je trouve un peu trop souple à mon goût.
Du fait de son agrément de conduite, la ville ne sera pas un problème pour notre DB6, toutefois comme toute voiture ancienne, ce n’est pas là qu’elle se sent le plus à l’aise. Je reste donc sur les belles routes cantonales de Suisse romande pour profiter pleinement de cette magnifique anglaise.
Après un essai en deux parties de la première génération de Vanquish, je ne peux qu’être satisfait de m’être retrouvé à nouveau aux commandes d’une Aston Martin tant cette marque dégage quelque chose de particulier. Le symbole de l’élégance, avec juste ce qu’il faut de sportivité, c’est délicieux à vivre et revivre, vivement la prochaine expérience.
Pas besoin de vous lister tous les modèles qui auraient leur place sur Timeless Addict tant ils sont nombreux, de la DB2/4 à la One-77, en passant bien évidemment par la DB3S et la mythique DB4 GT Zagato, voire tout simplement une DB4 GT « normale » qui est la plus désirable des Aston à mes yeux.
Avant de terminer, parlons encore un instant de la DB6 Vantage dont nous avons disposé pour cet essai. Comme indiqué au préalable, sa robe « Almond Green » n’est pas sa teinte d’origine, elle était toutefois disponible sur ce modèle à l’époque, ce n’est donc pas vraiment un souci, surtout que ça lui va à merveille. Oui je sais, je me répète.
Cette DB6 Vantage a été fabriquée en 1966, cependant il s’agit d’un modèle 1967, c’est d’ailleurs au début de cette même année qu’elle a été livrée neuve au Québec. Après un début de vie au Canada, elle est arrivée en Europe et elle est passée dans les mains de différents chanceux. Son propriétaire actuel l’a faite entièrement restaurer il y a quelques années chez Aston Martin Works ce qui explique son état exceptionnel à tous les niveaux. Aujourd’hui il désire s’en séparer, donc si cela vous tente, je vous invite à prendre contact avec Pascal de Sioux Automobiles.
Le mythe Aston Martin est quelque chose auquel il est difficile de résister et cette DB6 Vantage le confirme une nouvelle fois.
Nos remerciements à Sioux Automobiles à Genève pour la mise à disposition de cette magnifique Aston Martin DB6 Vantage.

